vendredi, août 23, 2013

La professionnalisation de la vie politique mène à la ruine

Par Patrick de Casanove, Président du Cercle Frédéric Bastiat. (article paru dans le journal Le Temps le 23 août 2013)

En France, c’est le marxisme. Le socialisme favorise l’apparition d’une nomenklatura de dirigeants privilégiés dont le but est de garder le pouvoir

Que les ministres planchent sur ce que sera la France en 2025 n’est pas fait pour rassurer. Ils sont incapables de résoudre les problèmes de la France d’aujourd’hui. Et pour cause: les politiques qu’ils ont suivies depuis des dizaines d’années en sont responsables. On peut rentrer dans le détail des raisons pour lesquelles la France est dans une situation difficile: dépenses publiques excessives, prélèvements confiscatoires, réglementation asphyxiante, etc. Il en existe une importante et souvent négligée: la professionnalisation de la vie politique.
Nous savons depuis Bastiat que les politiciens, les agents de l’Etat, sont mus par l’intérêt personnel comme les autres hommes. Buchanan formalisera cela dans la «théorie des choix publics». Il recevra le Prix Nobel.
L’homme politique étatiste s’appuie sur des théories économiques, philosophiques, religieuses qui magnifient le rôle de l’Etat, du législateur, du prince ou du guide. En France, c’est le marxisme. Le socialisme favorise l’apparition d’une nomenklatura de dirigeants privilégiés dont le but est de garder le pouvoir. Le politicien doit donc bâtir une carrière politique comme d’autres bâtissent une carrière professionnelle.
La professionnalisation favorise le conformisme. Pour faire carrière, le politicien ne fait pas de vagues, rentre dans le moule, trouve un tuteur. Cela exclut les innovations, les idées qui s’écartent de «la ligne» ou qui sortent des cadres de référence. Il satisfait des groupes de pression, des clientèles, achète des voix. Bien entendu, la justification est altruiste: l’intérêt général, la justice sociale, l’éradication de la misère, l’égalité, la lutte contre le chômage, etc. Pour faire carrière, le politicien montre qu’il sert à quelque chose. Il intervient donc sur tout et n’importe quoi. La réglementation de la vie privée ne crée que des faux droits des uns aux dépens des autres, ce qui détruit le lien social. L’invasion de la vie privée entraîne l’inflation réglementaire et législative. La moindre action, la plus petite initiative en France, est soumise à une loi ou à un règlement. L’existence de ces autorisations et interdictions arbitraires est la source de la corruption. Pour faire tourner l’Etat de plus en plus obèse, il faut une machine administrative de plus en plus lourde. Ce qui augmente son temps de réaction, son inefficacité et sa nocivité. Pour financer cette immense machine et empêcher les individus d’agir selon leurs propres choix, il faut des moyens gigantesques. Que ce soit pour le fonctionnement ou pour la redistribution à la clientèle. Cela induit la fiscalité écrasante.

Dans l’économie réelle, l’amélioration importante des rémunérations en entreprise dépend de l’accession à un poste supérieur, mieux rémunéré. Il en est de même en politique. Le cumul des mandats ou un mandat «supérieur» font partie de l’avancement du politicien. Pour cumuler des mandats, il faut en créer, d’où un millefeuille administratif. Celui-ci n’est donc pas prêt de disparaître. L’arrivée de jeunes loups n’est pas bonne pour les caciques. Très ambitieux et voulant aussi faire carrière, ils prendront des places aux anciens, nuisant ainsi à l’avancement de ces derniers. La classe politique se renouvelle peu.
Il faut durer donc influencer l’éducation et les médias pour que les gens restent soumis, voire consentants, ce qui est le mieux.
Dans cette situation, la réduction des dépenses publiques, la simplification administrative, l’absence de corruption ne sont que des incantations.
La base de toute solution est de définir qui fait quoi. A l’Etat les fonctions régaliennes, le filet de sécurité qui vient en aide aux personnes dans le besoin et finance la transition d’un régime totalitaire mou vers un régime de libre choix. Aux citoyens la liberté économique (qui va au-delà de l’économie stricte).
Grâce à cela, les hommes politiques n’auront plus de soucis de carrière. Rares seront ceux que leur activité politique occupera à plein temps. Ils auront la nécessité d’avoir un vrai métier, ce qui leur permettra de ne pas être coupés des réalités de manière bien plus efficace que le cumul d’un mandat local et d’un mandat national. Il semble judicieux qu’avant d’aller réglementer la vie des autres, il soit indispensable d’avoir donné les preuves de ses capacités à mener sa barque dans une activité économique utile. Cette expérience de la vraie vie sera plus formatrice pour le gouvernement des hommes que tous les cours théoriques dispensés en école spécialisée, aussi prestigieuse soit elle. Les règlements et l’intervention infinie de l’Etat dans la sphère privée créent corruption et conflits d’intérêts. Quand chacun est libre de choisir sa vie, il n’y a pas de corruption parce qu’il n’y a personne à corrompre. Avoir un vrai métier ne crée pas de conflits d’intérêts puisque le domaine d’intervention des politiciens ne concerne pas l’économie. Les conflits d’intérêts disparaissent naturellement, y compris pour les fonctionnaires qui vivent de redistribution. Ainsi, ceux qui font les normes, lois et règlements ne sont pas soumis aux lobbies de ceux qui les subissent ou en profitent. Les domaines d’intervention étant limités, les politiciens sont moins nombreux et la machine administrative s’allège. La simplification administrative est logique et inévitable, le millefeuille disparaît.

Cerise sur le gâteau, la liberté économique et le libre choix permettent la meilleure affectation des moyens sans gaspillage. La prospérité est à la clé. La politique économique et les constructions artificielles ne peuvent obtenir ce résultat. Les filières d’avenir décidées par l’Etat et aussitôt oubliées, les multiples plans inefficaces et coûteux, les politiques publiques volontaristes et ruineuses, les déficits publics et la dette le rappellent tous les jours.
La Suisse avec son système de politiciens «miliciens» peut servir d’exemple. La taille du pays n’a pas d’importance parce que seuls les individus sont les acteurs réels de la société, quelle qu’en soit la taille.

1 commentaire:

Libéralisateur a dit…

"Que tout cela est beau !"... (Le Bourgeois Gentilhomme ...)
Parce qu'enfin pour changer tout cela, il faut légiférer !
Et qui c'est qui va mettre cela à l'ordre du jour de l'Assemblée ? Qui c'est qui va voter ? ... Un ensemble d'individus qui couperaient la branche sur laquelle ils sont assis ? Et très confortablement en plus.
Bien sûr que je suis pour un changement radical de cet acabit. Mais pour le rendre réaliste il faut tout autant le mettre en musique que d'énoncer tous ses bienfaits.
Et commencer à le mettre en musique, cela passe absolument par "sortir" l'entier de la classe politique actuelle. Comme ce n'est pas ni en s'abstenant ni en votant blanc, mais en choisissant une option unique qui ne soit ni UMP ni PS, mais ralliant déjà tous ceux qui ne font plus confiance à cette classe politique là. Il va donc bien falloir voter Front National. Même si pour certains il leur faudra prendre des gants et oublier l'Union Européenne et même se boucher le nez, tant le "politiquement correct" leur a dit que cela sentait la merde.
Mais lors de l'attendue proclamation des résultats, la vie politique française en sera radicalement bouleversée, car ses politiciens professionnels viendront d'être électoralement virés.
Là et surtout eux, devront revoir leurs prémisses et mettre en place non seulement la primauté des citoyens, mais le statut de politicien milicien.