mercredi, octobre 19, 2011

L’oraison funèbre du libéralisme ou des partis conservateurs?

par Emmanuel Garessus

Le déclin du libéralisme nous est promis par les médias lors des élections de ce dimanche. Depuis plus d’un siècle, la tendance baissière semble être la nature habituelle des partis d’inspiration libérale
Le déclin du libéralisme nous est promis par les médias lors des élections de ce dimanche. Depuis plus d’un siècle, la tendance baissière semble être la nature habituelle des partis d’inspiration libérale. En 1901, lors des journées de son parti, le libéral allemand Friedrich Naumann consacrait son exposé sur l’affaiblissement du libéralisme, selon un éditorial de la Frankfurter Allgemeine sur l’«oraison funèbre du libéralisme»1. Aujourd’hui, ni le PLR suisse, ni le FDP allemand, ni le minuscule Parti Libéral Démocrate français ne dépassent le statut de partis largement minoritaires.
Pourtant les idées libérales sont une alternative au «centralisme démocratique» imposé avec force de Washington à Bruxelles et qui ne mène qu’à une succession de crises. N’est-on pas en train, avec la crise de la dette européenne, de traverser la plus grande expérience de déresponsabilisation de l’histoire économique? Au moment où les socialistes chantent le soi-disant échec du capitalisme, les dirigeants européens reprennent leur politique centralisatrice et jouent la carte de l’économie administrée. «L’Europe a besoin des vertus slovaques», titrait en couverture la NZZ de samedi. La Slovaquie, qui a d’abord refusé le «plan de sauvetage grec», a fait preuve de responsabilité morale, elle qui, comme l’Estonie et la Finlande, a entrepris les réformes exigeantes que l’Europe latine se refuse. La NZZ rappelle que la mentalité d’endetté mène à une impasse. Et pour sortir d’une impasse, rien ne sert d’un G20 ou d’un sommet des chefs d’Etat européens. La seule solution, c’est la marche arrière.
Les partis issus du libéralisme sont trop courtois avec l’UE. Craignent-ils de présenter les mérites de l’économie de marché? Chacun vante les mérites de Steve Jobs et du groupe Apple. Mais n’est-ce pas un symbole du capitalisme triomphant, orienté corps et âme sur la productivité et le profit pour les bienfaits de la communauté? Les «indignés», iPhone à la main, le comprennent-ils? Certains partis «libéraux auraient pu le rappeler et, parallèlement, se distancier des managers de banques dont les risques sont transférés à la communauté. Qu’est devenue la responsabilité individuelle dans l’économie actuelle? Les partis d’«inspiration libérale» auraient pu montrer que nous ne traversons «pas une crise de la spéculation, mais bien la menace d’un défaut possible d’obligations souveraines présentées comme les plus sûres, d’une réglementation qui a forcé leur détention par les institutions financières, et d’un dépassement dangereux des déficits», ainsi que l’explique Alain Madelin2.
La garantie dont jouissent les grandes banques est une gigantesque subvention qu’il convient de dénoncer. Quand décidera-t-on de mettre en œuvre les règles du capitalisme?
La campagne électorale n’a traité l’Europe que sur le thème «du franc fort». Quelle tristesse! Les raisons culturelles et morales de la crise auraient mérité davantage de place. Car la crise européenne montre aussi que l’Etat social n’est pas seulement trop cher. Il conduit à la ruine des assurances sociales, provoque la rupture du tissu politique et social et empêche toute incitation à la coopération sociale spontanée. Le résultat se lit d’Athènes à Paris. L’excès d’Etat social mène à une diminution du niveau de vie de tout un pays.
La morale est du côté de l’économie de marché, ainsi que le montre Viktor Vanberg dans une étude sur l’économie et la mo-­
rale3. L’étude des règles permettant d’accroître le bien commun est inséparable de l’économie de marché. Depuis 1776 et Adam Smith, avec la «Richesse des nations», l’économie s’est préoccupée des mérites de l’échange, de ce qui «devrait être «et non pas uniquement de ce «qui est». La «théorie de la justice» de John Rawls, parue en 1971, indiquait pour sa part comment l’économie de marché facilitait la coopération sociale et la réciprocité. L’économie de marché ne comporte pas de déficiences éthiques et n’a nul besoin d’un ajout «social». Ses résultats sont convaincants. Il suffit de considérer le sens des flux migratoires, des pays socialistes vers les économies capitalistes. Le capitalisme souffre pourtant d’un défaut politiquement coûteux. Il est remis en cause par les demandes d’interventions des employés menacés par des concurrents plus innovants ou moins coûteux. Car le capitalisme comporte deux faces, l’une agréable et l’autre exigeante. Les deux sont indissociables. Pourtant la concurrence est aussi un formidable mécanisme d’incitation (à l’innovation et à la prise de risque), un processus de découverte (essais et erreurs) et un instrument de dépossession du pouvoir (car personne n’a le monopole du savoir).
La concurrence accroît le bien commun en transformant les motivations d’une action égoïste (la recherche du profit) en une action solidaire. Un individu augmente ses chances de revenu par une offre attractive aux consommateurs (iPhone par exemple). Cette quête du meilleur produit ou du meilleur service accroît la productivité et la liberté de choix. C’est un gain pour toute l’économie. Mais les fruits du capitalisme ne sont pas gratuits. Les employés et les actionnaires sont sous pression et incités à prendre des risques.
Les partis de droite ont été «conservateurs» durant cette campagne, se limitant à la défense du statu quo et de leurs groupes d’intérêt, comme les partis de gauche et leur défense des fonctionnaires. Certes la tâche des partis d’inspiration libérale n’était pas aisée. La liberté se définit par la négative, par l’absence de contrainte d’un individu sur un autre. Le libéral refuse le paternalisme étatique et prône une politique d’abstinence de l’Etat forcément impopulaire, voire élitaire, et minoritaire.
Mais au moment où le monstre liberticide européen continue à s’enfoncer et menace les récalcitrants, suisses, slovaques et estoniens, les vertus de responsabilité individuelle devraient être davantage défendues. C’est une question de morale.

1. Grabrede auf den Liberalismus, Rainer Hank, FAZ, 1.1.2011
2. 
Lettre ouverte à Arnaud de Montebourg, Alain Madelin, Institut Turgot, 14.10

3. Moral und Wirtschaftsordnung, Viktor Vanberg, Walter Eucken Institut, Ordo, 2011

samedi, octobre 15, 2011

Est-ce d'une telle société dont nous avons besoin ?




"« Croyez-vous vraiment que nous voulons que nos lois soient respectées ? dit Ferris. Au contraire, nous voulons qu’on les enfreigne. Il va falloir vous mettre dans la tête que nous ne sommes pas des enfants de chœur, monsieur Rearden. Comprenez-moi bien : Nous ne sommes plus à l’époque des beaux gestes. C’est le pouvoir qui nous intéresse, rien d’autre. Vous n’étiez que des amateurs à ce jeu-là. Alors que nous savons y faire et vous feriez mieux de le piger. Gouverner des hommes innocents est impossible. Le seul pouvoir d’un Etat, c’est de mettre les contrevenants hors d’état de nuire. Et quand il n’y a pas assez de contrevenants, on en fabrique. Il suffit de déclarer tellement de choses hors la loi qu’il devient impossible de vivre sans l’enfreindre. Qui voudrait d’une nation de citoyens respectueux des lois ? Que pourrait-on en tirer ? Mais si vous promulguez des lois qui ne peuvent être ni respectées ni appliquées ni objectivement interprétées, vous fabriquez une nation de fraudeurs … Et là, il ne reste plus qu’à en récolter les fruits. Voilà la méthode, monsieur Rearden. C’est la règle du jeu. Quand vous l’aurez comprise, nous n’aurons plus aucun mal à faire affaire ensemble. »

Vient de paraître l'excellente traduction par Sophie Bastide-Foltz, de l'ouvrage de référence d'Ayn Rand - Atlas Shrugged" - écrit en 1957 et ce, sous le titre "La Grève".

Ce texte représente tant d'analogies avec ce que nous connaissons, plus de 50 ans après ce livre quasi prophétique, que je n'ai pu m'empêcher de vous soumettre cet extrait. Comme le démontre Philippe Némo dans son récent ouvrage "La régression intellectuelle de la France", la "mère de toutes les réformes en France", passe par la révocation des récentes lois Gayssot et celles du même acabit. Ce sont plus de 90% des lois qu'il importe de supprimer en France pour simplement libérer les individus et donc la croissance.