Par Patrick de Casanove, Président du Cercle Frédéric Bastiat. (article paru dans le journal Le Temps le 23 août 2013)
En France, c’est le marxisme. Le socialisme favorise l’apparition d’une nomenklatura de dirigeants privilégiés dont le but est de garder le pouvoir
Que les ministres planchent sur ce que sera la France en 2025 n’est pas fait pour rassurer. Ils sont incapables de résoudre les problèmes de la France d’aujourd’hui. Et pour cause: les politiques qu’ils ont suivies depuis des dizaines d’années en sont responsables. On peut rentrer dans le détail des raisons pour lesquelles la France est dans une situation difficile: dépenses publiques excessives, prélèvements confiscatoires, réglementation asphyxiante, etc. Il en existe une importante et souvent négligée: la professionnalisation de la vie politique.
Nous savons depuis Bastiat que les politiciens, les agents de l’Etat, sont mus par l’intérêt personnel comme les autres hommes. Buchanan formalisera cela dans la «théorie des choix publics». Il recevra le Prix Nobel.
L’homme politique étatiste s’appuie sur des théories économiques, philosophiques, religieuses qui magnifient le rôle de l’Etat, du législateur, du prince ou du guide. En France, c’est le marxisme. Le socialisme favorise l’apparition d’une nomenklatura de dirigeants privilégiés dont le but est de garder le pouvoir. Le politicien doit donc bâtir une carrière politique comme d’autres bâtissent une carrière professionnelle.
La professionnalisation favorise le conformisme. Pour faire carrière, le politicien ne fait pas de vagues, rentre dans le moule, trouve un tuteur. Cela exclut les innovations, les idées qui s’écartent de «la ligne» ou qui sortent des cadres de référence. Il satisfait des groupes de pression, des clientèles, achète des voix. Bien entendu, la justification est altruiste: l’intérêt général, la justice sociale, l’éradication de la misère, l’égalité, la lutte contre le chômage, etc. Pour faire carrière, le politicien montre qu’il sert à quelque chose. Il intervient donc sur tout et n’importe quoi. La réglementation de la vie privée ne crée que des faux droits des uns aux dépens des autres, ce qui détruit le lien social. L’invasion de la vie privée entraîne l’inflation réglementaire et législative. La moindre action, la plus petite initiative en France, est soumise à une loi ou à un règlement. L’existence de ces autorisations et interdictions arbitraires est la source de la corruption. Pour faire tourner l’Etat de plus en plus obèse, il faut une machine administrative de plus en plus lourde. Ce qui augmente son temps de réaction, son inefficacité et sa nocivité. Pour financer cette immense machine et empêcher les individus d’agir selon leurs propres choix, il faut des moyens gigantesques. Que ce soit pour le fonctionnement ou pour la redistribution à la clientèle. Cela induit la fiscalité écrasante.
Dans l’économie réelle, l’amélioration importante des rémunérations en entreprise dépend de l’accession à un poste supérieur, mieux rémunéré. Il en est de même en politique. Le cumul des mandats ou un mandat «supérieur» font partie de l’avancement du politicien. Pour cumuler des mandats, il faut en créer, d’où un millefeuille administratif. Celui-ci n’est donc pas prêt de disparaître. L’arrivée de jeunes loups n’est pas bonne pour les caciques. Très ambitieux et voulant aussi faire carrière, ils prendront des places aux anciens, nuisant ainsi à l’avancement de ces derniers. La classe politique se renouvelle peu.
Il faut durer donc influencer l’éducation et les médias pour que les gens restent soumis, voire consentants, ce qui est le mieux.
Dans cette situation, la réduction des dépenses publiques, la simplification administrative, l’absence de corruption ne sont que des incantations.
La base de toute solution est de définir qui fait quoi. A l’Etat les fonctions régaliennes, le filet de sécurité qui vient en aide aux personnes dans le besoin et finance la transition d’un régime totalitaire mou vers un régime de libre choix. Aux citoyens la liberté économique (qui va au-delà de l’économie stricte).
Grâce à cela, les hommes politiques n’auront plus de soucis de carrière. Rares seront ceux que leur activité politique occupera à plein temps. Ils auront la nécessité d’avoir un vrai métier, ce qui leur permettra de ne pas être coupés des réalités de manière bien plus efficace que le cumul d’un mandat local et d’un mandat national. Il semble judicieux qu’avant d’aller réglementer la vie des autres, il soit indispensable d’avoir donné les preuves de ses capacités à mener sa barque dans une activité économique utile. Cette expérience de la vraie vie sera plus formatrice pour le gouvernement des hommes que tous les cours théoriques dispensés en école spécialisée, aussi prestigieuse soit elle. Les règlements et l’intervention infinie de l’Etat dans la sphère privée créent corruption et conflits d’intérêts. Quand chacun est libre de choisir sa vie, il n’y a pas de corruption parce qu’il n’y a personne à corrompre. Avoir un vrai métier ne crée pas de conflits d’intérêts puisque le domaine d’intervention des politiciens ne concerne pas l’économie. Les conflits d’intérêts disparaissent naturellement, y compris pour les fonctionnaires qui vivent de redistribution. Ainsi, ceux qui font les normes, lois et règlements ne sont pas soumis aux lobbies de ceux qui les subissent ou en profitent. Les domaines d’intervention étant limités, les politiciens sont moins nombreux et la machine administrative s’allège. La simplification administrative est logique et inévitable, le millefeuille disparaît.
Cerise sur le gâteau, la liberté économique et le libre choix permettent la meilleure affectation des moyens sans gaspillage. La prospérité est à la clé. La politique économique et les constructions artificielles ne peuvent obtenir ce résultat. Les filières d’avenir décidées par l’Etat et aussitôt oubliées, les multiples plans inefficaces et coûteux, les politiques publiques volontaristes et ruineuses, les déficits publics et la dette le rappellent tous les jours.
La Suisse avec son système de politiciens «miliciens» peut servir d’exemple. La taille du pays n’a pas d’importance parce que seuls les individus sont les acteurs réels de la société, quelle qu’en soit la taille.
vendredi, août 23, 2013
mercredi, août 14, 2013
"Démocratie" ou Libéralisme ?
Je me permet de vous inviter à lire ci- après l'excellente recension que Francis Richard a fait de l'ouvrage de Frank Karsten et Karel Beckman "Dépasser la Démocratie".
"La démocratie est-elle l'horizon indépassable de la liberté? Deux auteurs néerlandais, Frank Karsten et Karel Beckman, font la démonstration, accessible à tous, du contraire.
Ainsi la démocratie représentative, basée sur la tyrannie du nombre, conduit-elle tout droit à la croissance de l'Etat, qui se transforme mécaniquement en Etat-providence, sans échappatoire, et remet-elle en cause la prospérité.
Dans leur livre iconoclaste, Dépasser la démocratie, ces deux auteurs démontent d'abord 13 mythes qui fondent la religion séculaire de la démocratie, telle que nous la connaissons dans les Etats-nations.
Puis ils démontrent que plus de démocratie se traduit par moins de liberté et moins d'harmonie.
Enfin ils proposent une alternative qui met en avant la liberté individuelle.
Quels sont ces 13 mythes de la démocratie?
1. Chaque vote compte: un vote sur des millions n'a aucune influence réelle et ne constitue qu'une vague préférence: "Il existe rarement une personne ou un parti avec lesquels vous êtes d'accord sur tous les sujets." Une fois que vous avez voté, on prend à votre place pendant des années (quatre ou cinq) de multiples décisions auxquelles vous n'avez pas donné votre accord.
2. Dans une démocratie le peuple gouverne: en réalité, ce n'est pas le peuple dans son entier qui gouverne, mais tout au plus une majorité d'électeurs, représentés par un plus petit nombre d'hommes politiques qui décident à leur place, souvent contre leur volonté, sous la pression de lobbys, de groupes d'intérêts et d'activistes.
3. La majorité a raison: "une chose n'est pas vraie par le simple fait que de nombreuses personnes croient en sa véracité.". De plus "[les gens] espèrent partager la charge avec d'autres et profiter d'avantages payés par d'autres" et "la quantité l'emporte sur la qualité". Ce n'est donc ni rationnel, ni moral.
4. La démocratie est politiquement neutre: "sur le long terme les démocraties occidentales ont constamment avancé dans la direction d'une plus forte interférence étatique, d'une plus grande dépendance envers l'Etat et d'un plus haut niveau de dépenses publiques."
5. La démocratie mène à la prospérité: il n'y a pas corrélation entre pays démocratiques et prospérité. L'évolution récente prouve même l'inverse: "Le secteur privé s'érode progressivement, dans un processus menaçant de détruire la richesse formidable créée par l'Occicent pendant des siècles."Dans une démocratie, "les citoyens sont incités à obtenir des avantages au détriment des autres" et les hommes politiques "à dépenser autant que possible, afin de pouvoir obtenir les mérites et laisser leurs successeurs payer la note".
6. La démocratie est nécessaire pour assurer une juste distribution des richesses et pour venir en aide aux pauvres: la distribution des richesses, sous forme de subventions, de privilèges et d'emplois, se fait sous la pression de lobbys: "Dans ce système, le parasitisme, le favoritisme, et la dépendance sont encouragés, tandis que la responsabilité individuelle et l'autonomie sont découragés." Pour aider les gens incapables de subvenir à leurs propres besoins, "il n'est pas nécessaire de créer la machine redistributive massive de nos démocraties. Cela peut être fait par des institutions privées de charité".
7. La démocratie permet de vivre tous en harmonie: "l'une des conséquences malheureuses du système démocratique est que les gens sont incités à former des groupes qui entreront nécessairement en conflit avec d'autres groupes. Il en est ainsi parce que vous n'avez aucune chance de transformer vos idées en loi qu'en faisant partie d'un groupe (ou d'un bloc d'électeurs)."
8. La démocratie est nécessaire pour créer un sentiment de communauté: "la démocratie est une organisation dont l'adhésion est obligatoire. Une véritable communauté repose sur la participation volontaire."
9. La démocratie signifie la liberté et la tolérance: "la liberté signifie que vous n'avez pas à faire ce que la majorité de vos semblables veut que vous fassiez, mais que vous pouvez décider pour vous-même." Les démocraties protègent quelques minorités et d'autres pas, limitent la liberté d'expression par de nombreuses exceptions.
10. La démocratie favorise la paix et aide à lutter contre la corruption: historiquement les démocraties ne sont pas pacifiques les unes avec les autres (voir les belligérants de la Grande Guerre) ou les récentes guerres (entre Russie et Géorgie ou entre Israël et Liban). "La corruption est inévitable là où l'Etat a beaucoup de pouvoir, quel que soit le système politique, et cela inclut évidemment la démocratie."
11. Dans une démocratie les gens obtiennent ce qu'ils désirent: en fait, c'est le contraire, parce que plus de démocratie conduit à plus de bureaucratie et à plus d'entraves pour le marché : "Le marché libre ne fonctionne pas par des processus démocratiques. Pourtant, dans un sens, le marché libre est plus "démocratique" que la démocratie car les citoyens peuvent faire leurs propres choix plutôt que d'avoir le gouvernement qui choisit pour eux."
12. Nous sommes tous favorables à la démocratie: parce que nous n'avons pas le choix, sinon. "En fait de nombreux démocrates bien-pensants seraient sans doute heureux d'échapper aux mesures qu'ils sont censés avoir choisies par les urnes."
13. Il n'y a pas de meilleure alternative: "nous n'utilisons pas la démocratie dans le domaine scientifique, nous ne votons pas sur la vérité scientifique, mais nous utilisons la logique et les faits. Il n'y a donc aucune raison de penser que la démocratie est nécessairement le meilleur système politique." De fait, "plus un Etat démocratique est grand et plus sa population est hétérogène, plus des tensions naîtront. Les différents groupes d'un tel Etat n'hésiteront pas à utiliser le processus démocratique pour piller les autres autant que possible, et pour interférer avec eux. A l'inverse, plus les unités administratives sont petites et plus la population est homogène, plus il est probable que les excès de la démocratie restent limités. Les gens qui se connaissent personellement ou se sentent liés les uns aux autres sont moins enclins à se voler et à s'opprimer les uns les autres".
Cette démythification est nécessaire et montre que la démocratie est intrinsèquement collectiviste:
"Les gens dans une démocratie se tournent naturellement vers l'Etat pour qu'il prenne soin d'eux."
Les hommes politiques, pour avoir la faveur des électeurs, jettent de l'argent sur les problèmes, réglementent à tout va et créent des commissions pour mettre en oeuvre leurs règles et réglementations. Il ne faut pas s'étonner que les bureaucraties fleurissent, que les parasites qui doivent leur existence à l'Etat pulullent, que les hommes politiques soient saisis par la mégalomanie et que des citoyens toujours plus nombreux deviennent des assistés.
L'Etat-providence encourage ceux qui en profitent et décourage ceux qu'il spolie. Le nivellement se fait par le bas. "Les désaccords privés sont continuellement transformés en conflits sociaux". "Tout le monde se sent poussé et encouragé à imposer sa vision du monde aux autres". Les hommes politiques ont une vue à court terme, celui de leurs échéances électorales et dépensent sans compter pour être réélus. L'argent manque? Ils augmentent les impôts, puis empruntent, enfin font tourner la planche à billets, c'est-à-dire pratiquent le vol légal d'une manière ou d'une autre.
Le mécontentement est général. Plus personne n'a confiance. Peu de gens remettent en cause l'origine principal des maux qu'ils subissent, la nature collectiviste de la démocratie. La situation est mûre pour l'appel à l'homme providentiel, au dictateur bienveillant:
"Fini les débats sans fin, l'indécision, la querelle , l'inefficacité. Mais ce serait une bien mauvaise affaire. Nous recevrions l'ordre public, c'est vrai. Mais le prix serait la fin de la liberté, du dynamisme et de la croissance."
Il existe une autre voie, celle de la décentralisation du pouvoir et de la liberté individuelle:
"La décentralisation, contrairement à la démocratie nationale, est un système de "vivre et laisser vivre". Alors laissons fleurir un millier de nations.
La diversité dans la gouvernance implique que les gens peuvent décider plus facilement sous quel système ils souhaitent vivre."
Les auteurs donnent l'exemple de la Suisse avec ses vingt-six cantons, ses 2'900 communes, ses impôts versés majoritairement au niveau cantonal et communal, et non pas fédéral, ses différentes réglementations qui se font concurrence, sa non-appartenance à l'Union européenne.
La Suisse est en effet "un pays qui réussit très bien":
"Au niveau mondial elle est dans le peloton de tête en termes d'espérance de vie, de niveau d'emploi, de bien-être et de prospérité. Elle est l'un des rares pays au monde qui n'a pas connu de guerre depuis plus d'un siècle. Malgré l'existence de quatre langues (allemand, français, italien et romanche), il y a beaucoup d'harmonie sociale."
Les auteurs ne préconisent pas la Suisse "comme un idéal ou comme la seule option":
"Mais c'est un exemple qui montre comment le pouvoir décentralisé pourrait fonctionner et comment il conduit à une baisse des impôts et à une plus grande liberté individuelle."
Pour les auteurs la société idéale serait la suivante:
"En fait, notre société idéale et libre serait semblable au modèle sur lequel est basé Internet. Avec Internet quelques règles s'appliquent. Elles sont simples à respecter. Pour le reste, chacun peut participer à sa guise."
Transposé, cela donne:
"Dans une société libre, la règle principale est de ne commettre ni fraude, ni violence, ni vol. Tant que les gens s'en tiennent à cette règle, ils peuvent offrir tous les services, y compris ceux qui sont considérés comme des "services publics". Ils peuvent également créer comme ils l'entendent leurs propres communautés - monarchiste, communiste, conservatrice, religieuse ou même autoritaire, pour peu que leurs "clients" adhèrent volontairement et pour peu qu'ils laissent les autres communautés tranquilles."
Cette société libre serait contractuelle:
"Une société devrait être fondée sur des contrats où les droits sont respectés et où toutes les parties savent à quoi s'en tenir."
Les auteurs sont confiants et pensent que leur société idéale n'est pas utopique. Ils placent leur espoir dans la technologie pour y parvenir:
"En réalité, la technologie est la véritable force de démocratisation, bien plus que le système démocratique lui-même."
Ils appellent de leurs voeux la constitution de petites unités administratives:
"Nous croyons que l'Etat-nation et la démocratie qui va avec sont des institutions du XXe siècle, pas du XXIe siècle. Le chemin vers l'autonomie et l'autogouvernement continuera, mais il ne passera pas par les larges démocraties. Il passera par la décentralisation et par l'organisation des personnes en plus petites unités administratives, conçues par les gens eux-mêmes."
Le préalable se trouve dans leur conclusion:
"Il est temps de nous libérer de la tyrannie de la majorité. Nous n'avons rien à perdre, à part les chaînes qui nous lient les uns aux autres."
Francis Richard
Dépasser la démocratie, Frank Karsten et Karel Beckman, 144 pages,Institut Coppet
"La démocratie est-elle l'horizon indépassable de la liberté? Deux auteurs néerlandais, Frank Karsten et Karel Beckman, font la démonstration, accessible à tous, du contraire.
Ainsi la démocratie représentative, basée sur la tyrannie du nombre, conduit-elle tout droit à la croissance de l'Etat, qui se transforme mécaniquement en Etat-providence, sans échappatoire, et remet-elle en cause la prospérité.
Dans leur livre iconoclaste, Dépasser la démocratie, ces deux auteurs démontent d'abord 13 mythes qui fondent la religion séculaire de la démocratie, telle que nous la connaissons dans les Etats-nations.
Puis ils démontrent que plus de démocratie se traduit par moins de liberté et moins d'harmonie.
Enfin ils proposent une alternative qui met en avant la liberté individuelle.
Quels sont ces 13 mythes de la démocratie?
1. Chaque vote compte: un vote sur des millions n'a aucune influence réelle et ne constitue qu'une vague préférence: "Il existe rarement une personne ou un parti avec lesquels vous êtes d'accord sur tous les sujets." Une fois que vous avez voté, on prend à votre place pendant des années (quatre ou cinq) de multiples décisions auxquelles vous n'avez pas donné votre accord.
2. Dans une démocratie le peuple gouverne: en réalité, ce n'est pas le peuple dans son entier qui gouverne, mais tout au plus une majorité d'électeurs, représentés par un plus petit nombre d'hommes politiques qui décident à leur place, souvent contre leur volonté, sous la pression de lobbys, de groupes d'intérêts et d'activistes.
3. La majorité a raison: "une chose n'est pas vraie par le simple fait que de nombreuses personnes croient en sa véracité.". De plus "[les gens] espèrent partager la charge avec d'autres et profiter d'avantages payés par d'autres" et "la quantité l'emporte sur la qualité". Ce n'est donc ni rationnel, ni moral.
4. La démocratie est politiquement neutre: "sur le long terme les démocraties occidentales ont constamment avancé dans la direction d'une plus forte interférence étatique, d'une plus grande dépendance envers l'Etat et d'un plus haut niveau de dépenses publiques."
5. La démocratie mène à la prospérité: il n'y a pas corrélation entre pays démocratiques et prospérité. L'évolution récente prouve même l'inverse: "Le secteur privé s'érode progressivement, dans un processus menaçant de détruire la richesse formidable créée par l'Occicent pendant des siècles."Dans une démocratie, "les citoyens sont incités à obtenir des avantages au détriment des autres" et les hommes politiques "à dépenser autant que possible, afin de pouvoir obtenir les mérites et laisser leurs successeurs payer la note".
6. La démocratie est nécessaire pour assurer une juste distribution des richesses et pour venir en aide aux pauvres: la distribution des richesses, sous forme de subventions, de privilèges et d'emplois, se fait sous la pression de lobbys: "Dans ce système, le parasitisme, le favoritisme, et la dépendance sont encouragés, tandis que la responsabilité individuelle et l'autonomie sont découragés." Pour aider les gens incapables de subvenir à leurs propres besoins, "il n'est pas nécessaire de créer la machine redistributive massive de nos démocraties. Cela peut être fait par des institutions privées de charité".
7. La démocratie permet de vivre tous en harmonie: "l'une des conséquences malheureuses du système démocratique est que les gens sont incités à former des groupes qui entreront nécessairement en conflit avec d'autres groupes. Il en est ainsi parce que vous n'avez aucune chance de transformer vos idées en loi qu'en faisant partie d'un groupe (ou d'un bloc d'électeurs)."
8. La démocratie est nécessaire pour créer un sentiment de communauté: "la démocratie est une organisation dont l'adhésion est obligatoire. Une véritable communauté repose sur la participation volontaire."
9. La démocratie signifie la liberté et la tolérance: "la liberté signifie que vous n'avez pas à faire ce que la majorité de vos semblables veut que vous fassiez, mais que vous pouvez décider pour vous-même." Les démocraties protègent quelques minorités et d'autres pas, limitent la liberté d'expression par de nombreuses exceptions.
10. La démocratie favorise la paix et aide à lutter contre la corruption: historiquement les démocraties ne sont pas pacifiques les unes avec les autres (voir les belligérants de la Grande Guerre) ou les récentes guerres (entre Russie et Géorgie ou entre Israël et Liban). "La corruption est inévitable là où l'Etat a beaucoup de pouvoir, quel que soit le système politique, et cela inclut évidemment la démocratie."
11. Dans une démocratie les gens obtiennent ce qu'ils désirent: en fait, c'est le contraire, parce que plus de démocratie conduit à plus de bureaucratie et à plus d'entraves pour le marché : "Le marché libre ne fonctionne pas par des processus démocratiques. Pourtant, dans un sens, le marché libre est plus "démocratique" que la démocratie car les citoyens peuvent faire leurs propres choix plutôt que d'avoir le gouvernement qui choisit pour eux."
12. Nous sommes tous favorables à la démocratie: parce que nous n'avons pas le choix, sinon. "En fait de nombreux démocrates bien-pensants seraient sans doute heureux d'échapper aux mesures qu'ils sont censés avoir choisies par les urnes."
13. Il n'y a pas de meilleure alternative: "nous n'utilisons pas la démocratie dans le domaine scientifique, nous ne votons pas sur la vérité scientifique, mais nous utilisons la logique et les faits. Il n'y a donc aucune raison de penser que la démocratie est nécessairement le meilleur système politique." De fait, "plus un Etat démocratique est grand et plus sa population est hétérogène, plus des tensions naîtront. Les différents groupes d'un tel Etat n'hésiteront pas à utiliser le processus démocratique pour piller les autres autant que possible, et pour interférer avec eux. A l'inverse, plus les unités administratives sont petites et plus la population est homogène, plus il est probable que les excès de la démocratie restent limités. Les gens qui se connaissent personellement ou se sentent liés les uns aux autres sont moins enclins à se voler et à s'opprimer les uns les autres".
Cette démythification est nécessaire et montre que la démocratie est intrinsèquement collectiviste:
"Les gens dans une démocratie se tournent naturellement vers l'Etat pour qu'il prenne soin d'eux."
Les hommes politiques, pour avoir la faveur des électeurs, jettent de l'argent sur les problèmes, réglementent à tout va et créent des commissions pour mettre en oeuvre leurs règles et réglementations. Il ne faut pas s'étonner que les bureaucraties fleurissent, que les parasites qui doivent leur existence à l'Etat pulullent, que les hommes politiques soient saisis par la mégalomanie et que des citoyens toujours plus nombreux deviennent des assistés.
L'Etat-providence encourage ceux qui en profitent et décourage ceux qu'il spolie. Le nivellement se fait par le bas. "Les désaccords privés sont continuellement transformés en conflits sociaux". "Tout le monde se sent poussé et encouragé à imposer sa vision du monde aux autres". Les hommes politiques ont une vue à court terme, celui de leurs échéances électorales et dépensent sans compter pour être réélus. L'argent manque? Ils augmentent les impôts, puis empruntent, enfin font tourner la planche à billets, c'est-à-dire pratiquent le vol légal d'une manière ou d'une autre.
Le mécontentement est général. Plus personne n'a confiance. Peu de gens remettent en cause l'origine principal des maux qu'ils subissent, la nature collectiviste de la démocratie. La situation est mûre pour l'appel à l'homme providentiel, au dictateur bienveillant:
"Fini les débats sans fin, l'indécision, la querelle , l'inefficacité. Mais ce serait une bien mauvaise affaire. Nous recevrions l'ordre public, c'est vrai. Mais le prix serait la fin de la liberté, du dynamisme et de la croissance."
Il existe une autre voie, celle de la décentralisation du pouvoir et de la liberté individuelle:
"La décentralisation, contrairement à la démocratie nationale, est un système de "vivre et laisser vivre". Alors laissons fleurir un millier de nations.
La diversité dans la gouvernance implique que les gens peuvent décider plus facilement sous quel système ils souhaitent vivre."
Les auteurs donnent l'exemple de la Suisse avec ses vingt-six cantons, ses 2'900 communes, ses impôts versés majoritairement au niveau cantonal et communal, et non pas fédéral, ses différentes réglementations qui se font concurrence, sa non-appartenance à l'Union européenne.
La Suisse est en effet "un pays qui réussit très bien":
"Au niveau mondial elle est dans le peloton de tête en termes d'espérance de vie, de niveau d'emploi, de bien-être et de prospérité. Elle est l'un des rares pays au monde qui n'a pas connu de guerre depuis plus d'un siècle. Malgré l'existence de quatre langues (allemand, français, italien et romanche), il y a beaucoup d'harmonie sociale."
Les auteurs ne préconisent pas la Suisse "comme un idéal ou comme la seule option":
"Mais c'est un exemple qui montre comment le pouvoir décentralisé pourrait fonctionner et comment il conduit à une baisse des impôts et à une plus grande liberté individuelle."
Pour les auteurs la société idéale serait la suivante:
"En fait, notre société idéale et libre serait semblable au modèle sur lequel est basé Internet. Avec Internet quelques règles s'appliquent. Elles sont simples à respecter. Pour le reste, chacun peut participer à sa guise."
Transposé, cela donne:
"Dans une société libre, la règle principale est de ne commettre ni fraude, ni violence, ni vol. Tant que les gens s'en tiennent à cette règle, ils peuvent offrir tous les services, y compris ceux qui sont considérés comme des "services publics". Ils peuvent également créer comme ils l'entendent leurs propres communautés - monarchiste, communiste, conservatrice, religieuse ou même autoritaire, pour peu que leurs "clients" adhèrent volontairement et pour peu qu'ils laissent les autres communautés tranquilles."
Cette société libre serait contractuelle:
"Une société devrait être fondée sur des contrats où les droits sont respectés et où toutes les parties savent à quoi s'en tenir."
Les auteurs sont confiants et pensent que leur société idéale n'est pas utopique. Ils placent leur espoir dans la technologie pour y parvenir:
"En réalité, la technologie est la véritable force de démocratisation, bien plus que le système démocratique lui-même."
Ils appellent de leurs voeux la constitution de petites unités administratives:
"Nous croyons que l'Etat-nation et la démocratie qui va avec sont des institutions du XXe siècle, pas du XXIe siècle. Le chemin vers l'autonomie et l'autogouvernement continuera, mais il ne passera pas par les larges démocraties. Il passera par la décentralisation et par l'organisation des personnes en plus petites unités administratives, conçues par les gens eux-mêmes."
Le préalable se trouve dans leur conclusion:
"Il est temps de nous libérer de la tyrannie de la majorité. Nous n'avons rien à perdre, à part les chaînes qui nous lient les uns aux autres."
Francis Richard
Dépasser la démocratie, Frank Karsten et Karel Beckman, 144 pages,Institut Coppet
vendredi, août 02, 2013
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